Dédiée à Robert Pinchon, un ami proche de Maupassant qu’il a connu au lycée, la nouvelle de l’auteur français, intitulée L’Aventure de Walter Schnaffs a été publiée pour la première fois en 1883. Découvrons ensemble cette nouvelle du 19ème siècle qui clôture le recueil Contes de la Bécasse.
Résumé détaillé de Contes de la Bécasse – “L’Aventure de Walter Schnaffs” de Guy de Maupassant
Un homme malheureux
Walter Schnaffs, qui avait été amené en France avec l’armée prussienne, menait une vie très malheureuse. Il était en surpoids et présentait des problèmes de santé. C’était un homme pacifique et bienveillant, marié et père de quatre enfants, qui avait une aversion pour les armes. Il se plaisait à manger de bons plats et à boire de la bière. C’est en homme angoissé que Walter Schnaffs vivait en territoire ennemi.
Le détachement
Il avançait avec son armée en direction de la Normandie lorsqu’il a été chargé d’une mission de reconnaissance. Il a alors été envoyé avec un détachement pour explorer une partie du territoire avant de se replier. La campagne semblait calme et il n’y avait aucun signe indiquant une résistance préparée. Cependant, lorsqu’ils sont descendus dans une petite vallée, les Prussiens ont été pris pour cible par une troupe de francs-tireurs.
Sauve qui peut
En apercevant un fossé, Walter Schnaffs décida de s’y jeter pour échapper aux Français. Cependant, la nuit approchait et il savait qu’il ne pourrait pas y rester caché indéfiniment, étant donné qu’il avait besoin de se nourrir pour survivre. Il comprit alors qu’il devait se rendre et devenir prisonnier des Français. En se faisant capturer, il espérait être sauvé, nourri et logé dans une prison sûre. Cependant, la perspective de rencontrer les francs-tireurs l’angoissait. Il finit par s’endormir sans trouver de solutions. Le lendemain matin, Walter Schnaffs se réveilla et continua à observer. La peur de mourir de faim l’obsédait, mais il attendit la nuit pour quitter le fossé. Il se dirigea vers un château lointain où les fenêtres, ouvertes, laissaient dégager une forte odeur de viande. Sans réfléchir, il apparut, casqué, provoquant la fuite de tout le monde en le voyant, étant donné qu’il était considéré comme un ennemi prussien. Walter enjamba le mur et se dirigea vers les assiettes. Puis il se mit à manger avec appétit, prenant de grandes bouchées et buvant dans la cruche pour faciliter la digestion. Après le repas, il déboutonna son uniforme pour se détendre, car il était incapable de faire un pas.
L’arrestation de Walter Schnaffs
Cinquante soldats se précipitèrent dans la cuisine et ligotèrent Walter Schnaffs des pieds à la tête, le capturant ainsi. Un officier annonça faussement que d’autres Prussiens avaient été blessés et s’étaient enfuis, affirmant que c’était une victoire.
Le colonel écrivit sur son carnet qu’il y avait eu cinquante Prussiens et que plusieurs d’entre eux étaient prisonniers (ce qui était faux). Au lever du jour, ils arrivèrent à la sous-préfecture de La Roche-Oysel, où la population était ravie. Les soldats mirent Walter Schnaffs dans une prison entourée de deux cents hommes.
Celui-ci fut fou de joie d’être enfin prisonnier, car cela représentait un endroit sûr.
Ainsi, le château de Champignet fut repris à l’ennemi après seulement six heures d’occupation. Le colonel Ratier, un marchand de drap qui avait dirigé les gardes nationaux de La Roche-Oysel, fut décoré pour avoir fourni de fausses informations.
Présentation des personnages
Walter Schnaffs, un soldat de l’armée prussienne, arrive en France pour envahir le pays. C’est un homme pacifique, bienveillant et doux, qui a laissé sa femme seule avec ses quatre enfants pour participer à une guerre qu’il n’a pas voulu faire. Bien qu’il soit grand et imposant, Walter n’est pas une brute et préfère les plaisirs simples de la vie, tels que la nourriture et les boissons, plutôt que de guerroyer. Il porte les armes en horreur. Perdu dans un territoire étranger, Walter se sent complètement isolé et effrayé par la violence de la guerre qui l’entoure. Chaque jour est un véritable cauchemar pour lui. Au cours d’un passage où il a échappé aux francs-tireurs français, il suit l’appel du ventre en mangeant de la nourriture dans un château. Lorsqu’il est finalement arrêté, Walter se sent soulagé, car il sait qu’il ne risquera plus sa vie sur le champ de bataille. Sa capture lui offre le luxe de rester en vie, d’avoir de la nourriture et de ne plus être obligé de combattre. Ce personnage incarne les soldats qui sont obligés de partir à la guerre contre leur gré pour défendre des intérêts qui ne les concernent pas.
Le Colonel Ratier est un personnage est le chef des gardes nationaux de La Roche-Oysel. Bien que nous ayons très peu de détails sur son physique, le Colonel Ratier est présenté comme un homme rusé et opportuniste. En effet, lorsque Walter Schnaffs se rend de lui-même aux gardes nationaux, le Colonel Ratier voit l’opportunité de s’approprier cette prise de guerre pour en tirer des bénéfices personnels. Il ment délibérément sur le nombre de prisonniers et de blessés, exagérant le nombre de soldats ennemis pour faire passer sa propre bravoure et augmenter sa reconnaissance. Malgré sa ruse, nous voyons bien que le Colonel Ratier n’est pas un héros de guerre. Il n’a pas combattu sur le champ de bataille, mais a su tirer avantage de la situation pour gagner en prestige et en pouvoir dans la communauté locale. Il symbolise les hommes qui, étant avides de reconnaissance sociale, sont prêts à déformer la réalité et s’appuyer sur des mensonges pour arriver à leurs fins.
Analyse de l’oeuvre
Le schéma narratif
Situation initiale | Walter Schnaffs, un soldat prussien, est malheureux et anxieux sur ce territoire étranger. Il est envoyé en reconnaissance avec un détachement pour explorer une partie du pays. |
Élément perturbateur | Le détachement de Walter descend dans une petite vallée et une troupe de francs-tireurs apparaît. Walter Schnaffs saute dans un large fossé pour échapper aux Français. |
Péripéties | 1. Walter Schnaffs doit trouver un moyen de sortir du fossé pour manger et survivre. 2. Il attend que quelqu’un passe pour se rendre, mais personne ne passe. 3. Il sort en pleine nuit pour se rendre dans un château. 4. Il fait fuir les occupants et se nourrit. |
Dénouement | Walter est finalement capturé par les Français. |
Situation Finale | Walter Schnaffs est emmené en prison à La Roche-Oysel. Il est heureux, car il est maintenant en sécurité derrière les barreaux. En ayant menti sur le nombre de Prussiens qu’il a combattu, le colonel Ratier, marchand de drap et chef des gardes nationaux, est décoré pour la prise de guerre. |
Les thématiques exploitées dans la nouvelle
- La Guerre : La guerre est l’une des thématiques centrales de ce texte. Elle est représentée comme source de terreur, de souffrance, d’angoisse et de danger pour le personnage principal, Walter Schnaffs, et pour tous les soldats impliqués. La peur est également un sentiment omniprésent, car les batailles et les rencontres avec l’ennemi sont constamment accompagnées de risques de mort imminente.
- La Solitude : La solitude est une autre thématique importante, car Walter Schnaffs se retrouve isolé et sans aide après s’être caché pour éviter d’être tué ou capturé. Sa famille est un autre élément clé, car il pense constamment à eux et à leur sort s’il ne revient pas vivant de la guerre. Cet épisode sur sa famille permet au lecteur de s’attacher plus facilement à ce personnage.
- La Faim : Tout au long du texte, Walter Schnaffs, qui est un homme appréciant les petits plaisirs simples de la vie, est affamé et souffre d’un manque de nourriture. Cela le rend vulnérable et le pousse à chercher de l’aide.
- La Survie : Pour assurer sa survie, Walter Schnaffs doit constamment réfléchir à sa situation et à la meilleure façon de survivre. Il envisage diverses options, comme se rendre prisonnier ou chercher de l’aide auprès des villageois, mais il doit peser les risques et les avantages de chaque choix.
- La mort ou la prison : Le désir d’être prisonnier montre comment la guerre peut pousser les gens à chercher la sécurité même en étant capturés. Walter Schnaffs préférerait être emprisonné que continuer à vivre dans la peur et dans l’incertitude. Il ne veut pas mourir et il n’en peut plus de cette guerre. Il porte en horreur, les combats, la fusillade. Il veut fuir le côté brutal de la guerre.
Walter Schnaffs, un anti-héro
Dans son récit, le romancier français cherche à montrer le quotidien d’un soldat prussien, mais en réalité, il peint le portrait d’un soldat qui pourrait être n’importe lequel, peu importe son pays d’origine. Il souhaite que le lecteur imagine la situation d’isolement affectif que vivent les soldats, loin de leur famille, enfants et village. En effet, Maupassant avait lui-même fait partie de l’artillerie française à l’âge de 20 ans, après la défaite de Sedan lors de la guerre franco-prussienne de 1870. Walter déteste les armes et considère l’armée comme un cauchemar. Il éprouve de la peur envers les francs-tireurs et les outils des paysans, et se définit profondément comme pacifique. Étant attaché à sa famille, cet être humain repense à sa famille qu’il a laissé au pays, ce qui le rend sensible.
En tant que soldat prussien, le personnage de Walter est tout le contraire du stéréotype du soldat courageux et sans pitié, Maupassant amuse le lecteur et rend son personnage attachant. Son parcours est en décalage par rapport à un soldat lambda. Lorsqu’il est dans le fossé, il pense d’abord au fait qu’il pourrait mourir de faim avant de réfléchir au fait qu’il pourrait succomber à une mort violente. Ceci apporte une touche d’ironie à ce personnage présenté comme un anti-héros. Dans L’aventure de Walter Schnaffs, Maupassant critique également l’exagération et la démesure des attaques françaises et la réaction des habitants de la Roche-Oysel.
Cependant, derrière cette histoire, Maupassant cherche avant tout à exprimer son opinion sur la guerre en général. Il la trouve inutile et stupide, ne reflétant pas la manière de penser des hommes qui y participent, ce qui est totalement absurde. Il est important de noter que l’armée prussienne était constituée de conscrits, tandis que l’armée française était composée de militaires de carrière ou non.