Littérature

Philippe Dumas, Contes à l’envers, Conte à rebours : résumé, personnages et analyse

Couverture de l’étude de lecture sur Conte à rebours de Philippe Dumas (Contes à l'envers), comportant un récapitulatif, une description des personnages et une interprétation analytique.
Ecrit par Les Résumés

Contrairement aux autres contes du recueil Contes à l’envers, Conte à rebours est une histoire qui ne puise son inspiration dans aucun conte original. Étudions ensemble ce conte d’un nouveau genre écrit par Philippe Dumas et Boris Moissard.

Résumé détaillé de Contes à l’envers – “Conte à rebours” de Philippe Dumas

Les malheurs de François Luné

Dans la ville de Frask, capitale de la Boursoulavie Occidentale, vivait un homme du nom de François Luné. Cet homme avait un léger petit problème, depuis sa naissance, il marchait à reculons. Ses parents avaient tout fait pour faire en sorte qu’il file droit, mais l’homme n’avait jamais pu exécuter le moindre pas en avant. Dans un monde où les gens allaient de l’avant, François Luné dénotaient. Si bien qu’à ses trente-cinq ans, il se retrouva célibataire, sans enfants, avec pour seule perspective d’avenir son métier de veilleur de nuit. Son avenir n’était donc pas radieux.

Le cas de la princesse Chouette

Cependant, le destin a voulu que le roi Livarot IX et la reine Aubergine de la Boursoulavie aient une fille, la princesse Chouette, qui a étonnamment commencé à marcher à reculons. Les souverains ont tout essayé pour la faire marcher normalement, mais en vain. Finalement, le roi a décidé de changer les lois de leur pays : désormais, tout le monde devait marcher à reculons sous peine de pendaison. Cette nouvelle règle a été difficile pour les habitants de la Boursoulavie, et de nombreuses personnes ont été exécutées.

La chance d’une vie

Un jour, le roi vit par la fenêtre un homme marcher à reculons avec une parfaite maîtrise, il s’agissait de François Luné. Fasciné, le roi demanda à ce que cet homme lui soit amené. Une fois en présence de François Luné, le roi le félicita pour son respect scrupuleux de la loi. Il décida alors de se débarrasser de son premier ministre, Monsieur de Seydur, en le piégeant pour avoir une raison de le condamner. Ainsi, le roi nomma François Luné au poste de Premier Ministre et lui offrit la main de sa fille, la princesse Chouette, bien que celle-ci n’ait que deux ans.

Maintenant, on marche sur les mains !

Quinze ans plus tard, le roi est mort et François a pris le trône sous le nom de François Ier. Entre temps, la Princesse Chouette est devenue une belle jeune femme. Ensemble, ils ont eu un fils, Vociféro, nommé ainsi en raison de ses capacités vocales exceptionnelles. Cependant, lorsque le bébé a commencé à marcher, le roi et la reine ont été surpris de constater qu’il ne marchait ni à l’endroit, ni à reculons. En effet, Vociféro marchait sur les mains. Pour aider son fils, François Ier a ordonné que tout le pays adopte l’habitude de marcher sur les mains. C’est la raison pour laquelle la Boursoulavie occidentale compte aujourd’hui le plus grand nombre de gymnastes, d’équilibristes, de funambules et d’acrobates.

Présentation des personnages

François Luné est le personnage principal de cette histoire. Sa jeunesse a été marquée par un handicap qui l’a empêché de marcher vers l’avant. Le professeur Tirand qualifie cette infirmité d'”inversion ambulatoire opiniâtre”, pour laquelle il n’y a aucune solution connue. En raison de son handicap, François Luné n’a jamais pu se marier et s’est vu refuser tous les emplois auxquels il avait postulé. Il a finalement trouvé un travail en tant que veilleur de nuit. Cependant, lorsque la loi a changé et que le roi Livarot a exigé que tout le monde marche à reculons, car sa fille présentait le même handicap que François, ce dernier était déjà adapté à ce nouveau monde. Le roi lui a alors donné la main de sa fille et l’a nommé Premier Ministre. Ainsi, François Luné incarne l’idée que la société, parfois inadaptée à certaines personnes, peut les freiner dans leur réussite.

Livarot IX est le roi de la Boursoulavie Occidentale. Cet homme se passionne pour la poésie et la chasse. Il apprécie également les voitures. En tant que bon père, il met tout en œuvre pour soigner sa fille. Néanmoins, quand il se rend compte qu’il ne peut rien faire pour elle, il décide, en vertu de son pouvoir, d’adapter la société au handicap de sa fille. Livarot IX est un homme intelligent, comme on peut le voir lorsqu’il choisit François comme Premier ministre, qui peut se montrer cruel et sans vergogne. En effet, il n’a aucune honte à évincer son Premier ministre et à pendre toute personne qui ne respecterait pas la loi. Toutefois, le roi Livarot est un homme visionnaire qui marie sa fille à François Ier car il sait que ce dernier sera le plus adapté à ce nouveau monde. Ce roi, si puissant soit-il, se retrouve donc impuissant lorsque sa fille se met à marcher à reculons.

La reine Aubergine est l’épouse du roi de la Boursoulavie. Elle est mise en second plan dans ce conte. Toutefois, si le Roi n’avait pas été capable de trouver une solution, elle aurait fini par se laisser mourir de désespoir. Contrairement à son mari qui tente coûte que coûte de marcher à reculons, la Reine a tendance à ne pas toujours respecter la loi ce qui agace le Roi qui a tendance à la reprendre.

Monsieur de Seydur est le Premier Ministre du roi Livarot IX qui va avoir pour tâche de rédiger les lois afin d’adapter la société à l’infirmité de la princesse Chouette. Ce personnage va également se retrouver confronté à un choix cornélien : refuser l’ordre de son monarque pour respecter la loi, ou faire ce que le roi lui demande au risque d’en subir les conséquences. Dans un cas comme dans l’autre, il sait qu’il est condamné. Il finit par avancer vers l’avant, comme le lui demande le roi. Ce dernier cherchait un moyen de l’évincer pour le remplacer par François. Monsieur de Seydure finit par être pendu.

Le professeur Tirand est le médecin spécialiste en matière de trouble de la circulation pédestre. C’est lui qui qualifie l’infirmité de François et de la princesse Chouette comme une “inversion ambulatoire opiniâtre“. Ce médecin semble ne servir à rien, si ce n’est mettre un nom sur une infirmité. Dans ce conte, ce personnage satirique sert de critique envers les médecins. C’est un homme gracieusement payé, qui use de mots savants, mais qui ne soigne personne.

La princesse Chouette est la fille du roi Livarot IX et de la reine Aubergine qui naît le trente-quatrième jour de l’an V du calendrier boursoulavien. Sa naissance marque des festivités dans tout le pays. Toutefois, lorsqu’elle atteint treize mois, on se rend compte que, tout comme François, elle se retrouve avec l’incapacité de pouvoir marcher vers l’avant. Elle est atteinte d’”inversion ambulatoire opiniâtre”. Mais Chouette est une princesse, son père s’arrange pour que la société s’adapte à son handicap. À l’âge de deux ans, son père donne sa main à François. Quinze ans plus tard, elle perd son père et cette jeune princesse est devenue une très belle femme. Elle donne naissance à Vociféro. La princesse Chouette symbolise le fait que les personnages ayant le plus de pouvoir peuvent plier le monde à leur condition et/ou à leur exigence.

Le prince Vociféro est le fils du roi François Ier et de la reine Chouette. Il est nommé ainsi en raison de sa voix. Avant qu’il se mette à marcher, tous les habitants de Boursoulavie s’interrogent sur la façon dont il va marcher. Toutefois, personne ne s’attend à ce qu’il marche avec les mains. Ce personnage est un “clin d’oeil” à tous les gymnastes, les équilibristes, les funambules et les acrobates que l’on retrouve dans les cirques.

Max Tricounet est le Premier Ministre de François Ier qui, comme Monsieur de Seydure avant lui, va devoir s’occuper de changer les lois. Dorénavant, les habitants de Boursoulavie ne marcheront que sur les mains.

Monsieur Luné est le père de François qui, en se rendant compte que son fils ne pourra jamais marcher normalement, finit par se laisser mourir. Ce personnage symbolise le rôle de l’aidant qui est parfois très difficile à assumer lorsqu’il s’agit d’une personne de notre famille qui présente une infirmité. En se donnant le choix de mourir, M. Luné se donne l’opportunité de ne pas assister à toutes les séries de souffrances que son fils va subir.

Analyse de l’oeuvre

Tout comme de nombreuses histoires de ce genre, Conte à rebours se déroule dans une contrée imaginaire. Il est intéressant de noter que le nom de ce pays, “Boursoulavie“, trouve son origine dans une expression populaire qui remonte au moins au XVIIIe siècle : “La bourse ou la vie“, souvent associée aux voleurs qui scandaient cette phrase à leurs victimes lors de vols à main armée. D’autre part, ce nom de pays est symbolique dans le sens où François, en raison de son infirmité, est un homme assez pauvre pour qui la vie ne tient qu’à un fil, tandis que la princesse Chouette, du fait de son rang social, va avoir le privilège de voir le monde s’adapter à son infirmité. Cette histoire est assez surprenante dans la mesure où, aujourd’hui, malgré tous les efforts effectués par la société, les personnes infirmes doivent s’adapter à la société. Des jeu de mot comme “Boursoulavie“, Conte à rebours de Dumas et de Moissard en a une myriade.

La symbolique des noms

Livarot et Aubergine

En donnant à son roi le nom de “Livarot“, l’auteur français fait référence à la Normandie qui a été pendant très longtemps un lieu d’inspiration pour l’auteur. En effet, le Livarot est un fromage de Normandie réputé pour sa forte odeur et son goût distinctif. En appelant son personnage ainsi, Dumas souhaite représenter un personnage disposant d’un caractère fort, un leader qui inspire la loyauté et le respect de son peuple. Effectivement, malgré quelques réfractaires, les gens du pays acceptent tous de se plier à cette nouvelle loi saugrenue où marcher à reculons devient obligatoire.

La reine, quant à elle, porte le nom d’un légume : Aubergine. Celui-ci peut suggérer un personnage mélancolique qui vit une période difficile. Dans ce conte, la reine va être totalement bouleversée par l’infirmité de sa fille. “Ils n’étaient plus que les ombres d’eux-mêmes, transis de désespoir, et on commençait à craindre pour leur santé.” La reine aurait pu rester dans cet état-là et se laisser mourir si son mari n’avait pas eu la ferme intention de transformer les lois.
Ainsi, si l’auteur utilise “Aubergine” comme nom de la reine, cela pourrait suggérer que la reine est mélancolique, solitaire ou qu’elle vit dans une période difficile, mais peut également signifier qu’elle est forte et persévérante malgré ces difficultés.

Ces deux personnages sont associés ensemble, autant par les liens sacrés du mariage que par leur nom respectif qui est en lien avec la nourriture.

François Luné et Chouette

Le nom “Luné” est un nom peu courant qui peut symboliser la lune et être lié à la nuit ainsi qu’à l’obscurité, révélant à l’avance la sombre histoire que François Luné va connaître dans sa vie. Par ailleurs, on peut voir une symbolique qui lie les deux personnages (Chouette et Luné) entre eux. Ces deux personnages présentent la même infirmité. La princesse Chouette étant plus jeune, elle a besoin du soutien de François Luné. Ainsi, l’association “Luné” et “Chouette” prend tout son sens, car cet animal étant un animal nocturne, la chouette a besoin de la nuit pour vivre, tout comme la princesse Chouette a besoin de François Luné pour survivre. Par ailleurs, la lune et la chouette évoquent tous deux des personnages ayant une grande sagesse intérieure.
Lorsqu’il est au pouvoir, François Luné prend le nom de “François Ier” qui n’est pas sans rappeler ce roi de France de la Renaissance, connu pour son mécénat artistique et son expansion territoriale.

La satire du médecin

Le professeur du Tirand est un spécialiste d’une maladie qui, dans le pays de Boursoulavie, ne compte que deux cas connus : François Luné et la princesse Chouette. Dans ce conte, ce médecin joue un rôle consultatif en annonçant aux parents des enfants atteints de cette infirmité qu’ils sont condamnés à vivre ainsi toute leur vie. “Il qualifia l’infirmité de François d’« inversion ambulatoire d’opiniâtre » et affirma qu’il n’y a aucun espoir de guérison“, “On convoqua le fameux professeur du Tirand […] Il rediagnostiqua son « inversion ambulatoire d’opiniâtre » […] Il répéta que c’était grave, probablement incurable et prononça quelques mots en grec. Il exprima enfin l’opinion que ce n’était pas de chance pour les parents royaux“. Dans les deux discours, le médecin s’adresse d’abord à la famille “Luné” de manière expéditive, puis avec davantage de formes à la famille royale. Cependant, que ce soit pour la famille Luné ou la famille royale, le professeur du Tirand, aussi éminent soit-il, ne sert à rien d’autre qu’à apposer un nom sur l’infirmité des deux victimes. Il ne propose aucune solution, ne tente même pas de soigner ses patients. La maladie est incurable, point final. C’est un expert qui le dit, cela ne peut qu’être vrai. Pourtant, c’est un médecin qui ne sert à rien, mais qui demande un prix exorbitant pour ses consultations : “c’était un praticien éminent, surtout quant à l’élévation de ses honoraires, et principalement habile pour mettre un nom sur des maux inconnus“. Mais bon, c’est un “spécialiste“, cela semble tout à fait normal. Ainsi, à travers ce personnage, Dumas critique les prétendus “spécialistes qui, selon le conte, sont chers, mais ne disent rien d’intéressant, hormis que la personne est condamnée. Cependant, lorsqu’on cherche à consulter un médecin, il est important de trouver un professionnel compétent et capable de proposer des solutions concrètes pour soigner et/ou soulager les patients. Choses que ne fait absolument pas le professeur du Tirand. D’autre part, le nom “Tirand” pourrait être une variante du nom “Tyran“, qui pourrait évoquer un personnage qui a une personnalité dominante, qui cherche à imposer sa volonté aux autres ou qui est perçue comme autoritaire.

Les deux morales du Conte de Dumas

Comme dans tout conte, il y a forcément une morale et celui de Dumas ne fait pas exception. Dans Conte à rebours, nous avons même le droit à deux morales bien distinctes. La première stipule que les personnes dites “inadaptées” par la société, le sont parce que la société n’est pas faite pour eux. Si celle-ci s’adaptait à eux, tout comme elle s’est adaptée à la princesse Charlotte, les adaptés deviendraient inadaptés et vice-versa. Ainsi, implicitement, on peut relever une seconde morale stipulant que ce qui nous apparaît être une contrainte, peut en réalité devenir notre meilleur atout comme l’illustre François Luné qui est devenu prince consort grâce à son infirmité.

Les Autres Histoires de Contes à L’Envers

La Belle Histoire de Blanche Neige 

Le Petit Chaperon Bleu Marine 

Le Don de la Fée Mirobola 

La Belle au Doigt Bruyant 

Le Pommier de Pomanchou 

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