Publié pour la première fois en 1897, le conte Comment le Chameau acquit sa bosse est rapidement devenu une histoire populaire pour les enfants. À travers ce récit, extrait du recueil Histoires comme ça, Kipling transmet des messages importants sur la persévérance, le travail acharné et les conséquences de l’arrogance. Découvrons cette œuvre du XXème siècle qui permet d’instruire tout en divertissant.
Résumé détaillé du recueil Histoires comme ça – “Comment le Chameau acquit sa bosse” de Rudyard Kipling
Au commencement des temps, dans un monde tout neuf, tous les animaux étaient obligés de travailler pour servir l’homme. Seul le chameau, trop paresseux, refusait toute tâche, préférant traîner dans le désert et contempler son reflet dans des flaques d’eau. Le cheval lui avait demandé de venir trotter avec lui, le chien lui avait suggéré de chercher et de ramener des choses, et le bœuf lui avait conseillé de labourer les terres. Mais il répondait toujours par un simple “bof” et refusait de travailler.
Les autres animaux allèrent se plaindre auprès de l’homme, qui comprit que le chameau ne travaillerait jamais. Il décida alors que les autres animaux travailleraient deux fois plus pour compenser l’inactivité du chameau. Cette décision provoqua la colère des animaux, qui se réunirent dans le désert pour invoquer le Djinn, responsable de tous les déserts. Ils lui expliquèrent que, dans ce monde où tout le monde était obligé de travailler, le chameau ne respectait pas ses engagements.
Le Djinn alla voir le Chameau qu’il trouva en train d’observer son reflet dans une flaque. Il l’interrogea, mais celui-ci ne sut répondre que par “Bof“. Alors le chameau qui ne voulait pas bosser eut la surprise de voir pousser une bosse sur son dos pour lui rappeler, à tout jamais, les trois jours pendant lesquels il n’a pas travaillé. Le Chameau se mit dès lors à l’ouvrage. Il travailla dur, mais fut incapable de rattraper les jours qu’il avait perdus.
Présentation des personnages
Le Chameau est un animal paresseux qui, contrairement aux autres animaux, refuse de travailler. Il préfère manger des plantes et observer son reflet dans les flaques. Cette dernière attitude laisse supposer que nous avons également à faire à un animal égocentrique et pour preuve, il répond constamment “Bof !” ce qui souligne son manque d’intérêt pour le travail. En un sens, il refuse de se soumettre à l’autorité. Ce personnage symbolise donc l’indolence et la désobéissance. La bosse qu’il possède est donc un moyen de lui rappeler les trois jours qu’il a passés sans travailler. Du fait de sa punition, le Chameau se met à travailler dur pour réussir. Cette transformation peut être vue comme une métaphore de la croissance personnelle où le Chameau apprend la valeur du travail et de la discipline.
Les autres animaux, le Cheval, le Chien et le Boeuf, sont obligé de travailler. Lorsqu’ils se rendent compte que le Chameau ne respecte pas les rêgles, ils se tournent d’abord vers leur maître (l’homme). Toutefois, ce dernier fait preuve d’injustice en contraignant les autres animaux à travailler deux fois plus. Ces personnages illustrent à quel point une décision personnelle peut impacter un groupe. Face à l’injustice de leur “maître”, il se tourne vers le “Djinn”, un être surnaturel. On peut y lire une certaine forme de spiritualité.
L’Homme n’a pas un rôle majeur dans cette histoire. Il est celui qui jouit du travail des animaux. Il incarne l’injustice en condamnant les autres animaux à travailler deux fois plus pour compenser l’inactivité du chameau. Ainsi, bien qu’il soit celui qui dirige les animaux, il n’a pas la possibilité de soumettre ce qui lui sont désobéissant. Plutôt que de condamner l’indolence, il se rabat sur ceux qui l’exploitent déjà pour les exploiter davantage.
Le Djinn est un personnage symbolique qui incarne la force de la nature. Cette créature magique représente la nature sauvage et hostile qui peut être dangereuse pour les humains et les animaux. L’arrivée du Djinn symbolise la puissance de la nature et rappelle l’importance de respecter les règles qui régissent l’équilibre de la vie. En punissant le Chameau pour son indolence, le Djinn démontre sa toute-puissance et rappelle au Chameau la nécessité de travailler. Cette leçon est importante, car contrairement à l’homme, le Djinn a le pouvoir de faire respecter l’ordre naturel des choses. Le Chameau apprend ainsi qu’il doit contribuer à l’équilibre de la vie en travaillant et en faisant sa part, tout comme les autres animaux.
Analyse de l’oeuvre
Schéma narratif
| Étape | Action | |
|---|---|---|
| Situation Initiale | Présentation de ce Chameau fainéant qui refuse de travailler et de se soumettre à l’Homme. Indolence et désobéissance. | |
| Élément déclencheur | Le Cheval, le Chien et le Bœuf invitent le Chameau à travailler. Celui-ci refuse en affichant son manque d’intérêt par un “Bof”. | |
| Péripétie 1 | Les animaux rapportent à l’Homme le fait que le Chameau refuse de travailler. L’homme décide de laisser le Chameau en paix. Toutefois, il oblige les autres animaux à travailler deux fois plus compenser l’inactivité du chameau. | |
| Péripétie 2 | Face à cette injustice, le Cheval, le Chien et le Bœuf se réunissent pour trouver une solution. Le Djinn apparaît pour régler le conflit. | |
| Élément de résolution | Le Djinn attribue une bosse au Chameau avec laquelle il sera obligé de travailler. | |
| Situation finale | Le Chameau travaille depuis ce jour avec une bosse sur le dos. Il ne réussira jamais à rattraper ses trois jours de travail et restera étranger à toutes les règles sociales. |
Les thématiques exploitées dans ce conte de Kipling
La paresse et ses conséquences : Le personnage du Chameau est paresseux et ne veut pas travailler. Les autres animaux essayent de le convaincre de travailler, en vain. En effet, celui marque clairement son indolence dans sa réponse “Bof ! qui affiche à la fois son mépris et son manque d’intérêt pour leur conditions. En étant puni, ce conte illustre clairement les conséquences négatives de la paresse, sa bosse est symbolique et lui rappellera à jamais son manque de travail au commencement des temps. “Le Chameau arriva en mâchant ses plantes grasses avec une paresse” / “Voilà ce que tu t’es mis sur le dos en refusant de bosser.”
Le respect et la coopération entre les animaux :En refusant de travailler, le chameau ne fait pas que désobéir, il se montre irrespectueux envers les autres animaux et indique clairement sa volonté de ne pas coopérer avec eux. En réagissant ainsi, c’est comme si le Chameau désirait imposer sa différence en ce monde. Ainsi, les animaux se liguent contre lui pour trouver une solution : “les Trois tinrent conseil, un indaba, un punchayet et un pow-wow, à la limite du Désert.“. En invoquant le Djinn, celui-ci rappelle le Chameau à l’ordre. Il s’arrange pour que l’équilibre de la vie ne soit pas menacé.
La paresse est punie & le travail est récompensé :Le Chameau reçoit une bosse en guise de punition pour sa paresse, tandis que les autres animaux qui travaillent sont récompensés. “Maintenant, tu vas bosser.” / “trois jours sans manger en vivant sur sa bosse“.
L’exploitation animale de l’homme : Dans ce conte, Kipling mentionne différentes tâches que les animaux peuvent faire pour les humains, comme le trot (cheval) “viens donc trotter comme nous tous !“, le rapport (le chien) “viens donc chercher et rapporter comme nous tous.“, le labourage (le bœuf) “viens donc labourer comme nous tous.“. Ces tâches montrent la diversité des rôles que les animaux peuvent jouer dans la vie quotidienne. Dans une certaine mesure, le fait que le chameau refuse de travailler peut être interprété par une volonté de rester libre et de ne pas être exploité.
L’utilisation de l’imaginaire : Kipling utilise des éléments imaginaires pour créer une histoire qui raconte comment le Chameau a acquis sa bosse. “Et voici l’histoire suivante qui raconte comment le Chameau acquit sa bosse.” “C’est alors qu’arriva le Djinn responsable de Tous les Déserts, enroulé dans un nuage de poussière (les Djinns voyagent toujours de cette manière car c’est Magique), et il s’arrêta pour palabrer et tenir un pow-wow avec les Trois.“.
L’importance du Djinn : une réponse surnaturelle : Ce personnage s’impose comme la voie de recours pour les animaux. En tant qu’être matériel, l’Homme n’est pas capable de trouver une solution satisfaisante. Pire encore, il propose une solution injuste “Je vais donc la laisser en paix [en parlant du chameau] et vous devrez travailler deux fois plus pour la remplacer.“. Ainsi, les trois animaux appellent le Djinn qui incarne une sorte d’être divin pour eux. En faisant apparaître le Djinn dans son conte, Kipling intègre le divin en quelque sorte. Du fait de sa sagesse et de sa magie, il est capable de résoudre les problèmes des animaux.
Un conte étiologique
Ce récit de Rudyard Kipling est un conte étiologique qui explique l’origine de la bosse du chameau. Il propose de donner une explication imaginaire à un fait que l’on ne maîtrise pas. Ainsi, si le chameau a une bosse, c’est parce qu’au commencement des temps, c’était un animal paresseux a acquis sa bosse. Celle-ci serait donc une punition magique infligée par un Djinn. En donnant une explication symbolique à un phénomène physique, l’auteur éveille la curiosité tout en transmettant une leçon morale sur l’importance du travail et les conséquences de la paresse.
La rencontre entre le Djinn et le Chameau est riche en symbolisme et met en évidence le thème de la paresse et de la punition. En refusant de travailler, le chameau subit une transformation physique qui représente sa charge supplémentaire et qui a des conséquences pratiques, psychologiques et sociales sur sa vie. La bosse devient ainsi une caractéristique distinctive du Chameau, symbolisant comment une faiblesse ou un défaut peut finir par devenir une force ou un élément positif.
Cependant, le message moral de cette histoire est clair : la paresse et le refus de travailler sont punis, tandis que la persévérance et le travail acharné sont récompensés. Les animaux qui ont travaillé dur sont récompensés, tandis que le Chameau, qui a été paresseux, est puni.
Un jeu de mot implicite inédit dans la version française
Dans la version française de Just So Stories (Histoires comme ça) de Rudyard Kipling, les traducteurs Louis Fabulet et Robert d’Humières apportent une mention particulière en réalisant un jeu de mots implicite entre la “bosse” du chameau et le verbe “bosser” : “(nous disons maintenant qu’il « travaille » pour ne pas le vexer)“. Ce jeu de mots a pour effet de rendre le texte plus accessible et plaisant pour les lecteurs francophones en introduisant un élément culturel et linguistique propre à la langue française.
En effet, le verbe “bosser“, issu du langage familier, signifie “travailler dur“, chose que le chameau se refuse à faire dans ce conte. Chez le Chameau, la bosse, quant à elle, lui permet de stocker de l’eau et de la nourriture pour ses longues périodes de voyage dans le désert. En jouant sur la similarité de prononciation entre les deux mots, les traducteurs cherchent à réaliser un effet comique afin de faire sourire le lecteur. Ce jeu de mots a aussi pour effet de souligner l’importance du travail qui est la morale de ce conte de Kipling. En fin de compte, on peut conclure que depuis cet incident au commencement des temps, le chameau s’attache à “rouler sa bosse”.
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